- Récit : souvenirs de vacances à Saint Jal d'un enfant de 5 ans, dans les années 1950


Remontons quelques décennies en arrière. Nous sommes en 1950 et j'étais alors un gamin de 5 ans. Depuis un peu plus d'un an déjà, je passais mes vacances à Saint Jal, chez ma grand-mère Louise et ma tante paternelle Elise. La première avait pris sa retraite du chemin de fer et avait quitté le gare du village où elle était chef de station.


Louise Cueille née Madelmont est ici à la gare de Saint Jal, au bord des voies, au centre, avec, de gauche à droite
son gendre Auguste Comby, sa fille Elise, puis son fils Marcel et sa belle-fille Germaine
(Doc. JPC).


Elle avait été remplacée dans cette responsabilité par Mme Chauffour, et elle habitait maintenant avec sa fille dans l'appartement de fonction qui avait été attribué à celle-ci, juste au-dessus de la mairie, en façade, sur la place du village. Au-dessus du monument aux Morts aussi, sur lequel le nom de son mari était gravé dans le marbre. Ma tante Elise était en effet veuve de guerre, et institutrice à Saint Jal, l'un des 4 enseignants du moment, avec Mme Bouchailloux, et Mr et Mme Martinie.


L'appartement de fonction de la tante Elise, juste au-dessus de la mairie (Col. JPC).

En dehors du temps des vacances, nous venions aussi de façon régulière passer les dimanches à Saint Jal.

Dans cet environnement privilégié, je croisais, suivant les périodes, mon cousin Gérard et sa grande sœur Monette. C'est avec elle que je faisais le concours de celui qui mangerait le plus des choux à la crème que nous confectionnait la grand-mère. Ma sœur Michèle était alors trop jeune pour faire partie de l'équipe; elle se joindra plus tard à nous. 


Louise Cueille à Saint Jal, avec ses trois premiers petits-enfants, Jean-Paul, Monette et Gérard (Doc. JPC)


OCCUPATIONS ET DISTRACTIONS

Les distractions n'étaient pas exceptionnelles, mais nous n'étions pas exigeants et nous n'avions pas le temps de nous ennuyer.

Il y avait tout d'abord les copains et les copines avec qui nous jouions. Pour moi Bernadette D, qui habitait juste en face, de l'autre coté de la place, et d'autres dont j'ai oublié les noms. Pour Gérard, c'était Riri F. Pour Monette Jeanine D, et puis aussi Lucienne D, disparue jeune, à la suite d'une grave maladie.

Une de mes distractions favorites consistait à construire des cabanes dans le grand jardin de la tante, qu'entretenait Mr Bourzeix. Il y avait aussi les bateaux en papier dans le ruisseau du Troh, dont je ne connaissais pas le nom à l'époque, dans sa partie comprise entre le bourg et la voie du chemin de fer, sur la route du Chatenet, là où il serpentait à travers des prairies parfaitement entretenues. Un jour je suis tombé dedans : beaucoup d'émotion, mais pas de conséquence.

Un de nos terrains de jeu favoris, c'était la classe de la tante, où nous faisions plein de bêtises, surtout la petite dernière lorsque qu'elle nous rejoignait, ainsi qu'elle l'avouera plus tard; son jeu préféré, un brin pervers, consistait à intervertir le contenu des pupitres des enfants. Belle pagaille sans doute le lundi à la reprise de la classe.

Cette classe était installée dans la pièce aujourd'hui occupée par le secrétariat de Mairie, les archives et le bureau de Monsieur le Maire : elle était très vaste. Le hall d'entrée actuel était à ce moment là le vestiaire des enfants. Pour changer, nous pouvions enfin prendre la place de la maitresse, sur l'estrade. Il y avait bien sûr dans la classe le tableau noir sur lequel nous étions heureux d'écrire et de dessiner à la craie, et puis au centre de la pièce, le poêle à bois. Il chauffait la classe bien sûr. Mais il servait aussi autrefois aux écoliers à réchauffer leur gamelle pour le repas de midi. Ils étaient en effet arrivés à pied le matin de bonne heure, parfois de loin depuis les villages des alentours, souvent chaussés de sabots, et il n'était pas question de rentrer manger à la maison.

Dans la cour de récréation, il y avait trois « cabinets », dont deux « à la turque » étaient destinés aux enfants. Celui du centre, réservé aux « grandes personnes », bénéficiait d'un certain confort : le trou était percé au centre d'un espèce de coffre en bois brut sur lequel il était possible de s'assoir. Il était le seul à avoir une porte qui le fermait du haut en bas. C'était aussi les cabinets de l'appartement qui en était dépourvu à l'étage : tous les matins, il fallait descendre vider le seau hygiénique. Et peut-être étaient-ils aussi ceux de la Mairie !

A l'emplacement du foyer rural se trouvait une vieille construction avec les préaux, et puis un hangar où ma tante rangeait ses outils de jardinage, et un garage dont bénéficiait un des autres enseignants. Dans un angle, vers le portail d'entrée, au dessus du garage, poussait une plante grimpante assez envahissante, qui donnait de multiples fleurs en corolle de couleur orange, du nom de bignone, je l'ai appris depuis. Dans l'angle extérieur de la classe, c'était une glycine qui s'accrochait comme elle le pouvait au mur. Deux gros tilleuls prospéraient dans la cour. Ils y sont toujours je crois.

C'est à Saint-Jal que j'ai appris à chercher les champignons et que j'y ai pris goût. C'était aux Bois Cousins, ou bien sur la route du Plantadis, et dans bien d'autres endroits dont je ne me souviens plus. Les cèpes étaient prétexte à de longues marches dans la nature, surtout pendant la période où ma grand-mère vivait, beaucoup moins par la suite.

Le fait d'habiter sur la place procurait quelques avantages. A l'époque, il était de tradition, à l'issue des baptêmes et des mariages que des dragées soient lancées depuis le clocher de l'église par l'ouverture située à mi-hauteur : les cousins étaient toujours au premier rang pour se remplir les poches, dès que les cloches sonnaient la fin de la cérémonie.


C'est de l'ouverture à mi-hauteur qu'étaient lancées les dragées (Col. JPC)


Et puis c'était aussi plus facile pour aller chercher l'eau au puits communal, sur la place. Si l'appartement de la mairie a bénéficié d'un branchement d'eau courante de façon assez précoce, je me souviens encore vaguement de la corvée qu'il fallait faire pour aller de l'autre coté de la place remplir les seaux au puits, à l'angle de la route qui part en direction du cimetière. Installé là comme une verrue, il ne laissait pas beaucoup de place pour circuler. Il a été rapidement détruit lorsque le bourg a bénéficié au robinet de l'eau des sources de l'Étang-Pontet, et lorsque il a fallu élargir le passage pour les voitures.

La promenade du soir, chaque soir, c'était d'aller « au lait », avec le bidon en aluminium. Avant la tombée de la nuit, nous prenions la route du cimetière, que nous longions par le petit chemin tout sombre sur sa gauche. Arrivés à la route nous tournions à droite et puis nous coupions à travers les bois en prenant à gauche un minuscule sentier qui nous menait en serpentant à la ferme d'Eugénie, au Peuch : une porte à 2 battants, haut et bas, la terre battue, le cantou, elle était loin de ressembler à la magnifique demeure qu'elle est devenue maintenant.

Une de nos autres occupations c'était la pêche. Pas la pêche aux poissons qui ne m'intéressait pas : je me contentais à ce sujet d'écouter le récit des exploits de mon père lorsqu'il était lui même enfant et qu'il habitait à la gare, avec ses captures de façon pas très régulière, à la bouteille, de goujons et de garlèches dans le ruisseau du village. Pour moi c'était les grenouilles, avec le père Treins dont je reparlerai plus loin, et les écrevisses sur la route en direction du Plantadis, à hauteur du pont au-dessus du cours d'eau.

Et puis il y avait les fêtes communales. Elles étaient importantes à l'époque, avec les chevaux de bois et différents manèges, les cavalcades avec déguisements, les bals et les courses cyclistes pour les grands, l'animation d'Elie Dubois que j'évoque dans une autre page. Tout cela juste sous nos fenêtres, tout comme les foires…


Un petit chinois lors de la fête de 1950, dans la cour de récréation, à l'angle de la classe de sa tante,
devant la glycine, avec les "cabinets" en arrière plan. Sans oublier la poule et ses poussins.
La fenêtre que l'on aperçoit est actuellement celle du bureau de Monsieur le Maire (Doc. JPC).


QUELQUES FIGURES LOCALES DES ANNEES 1950


Certaines restent bien ancrées dans mes souvenirs d'enfant. Il s'agissait de personnes âgées très accueillantes, chez qui avec ma tante, nous passions beaucoup de temps.

« La Bizage » était une personnalité dans le bourg. C'est ainsi qu'on l'appelait. Je crois bien que son vrai nom était  Marie Dubois, née Bizage ou Bisage et qu'elle était la mère d'Emile et d'Elie Dubois, respectivement électricien-menuisier-réparateur de vélos au bourg pour l'un, et représentant de commerce pour la maison Ricard pour l'autre. Mais je n'en suis pas sûr. Elle vivait avec son chien dans un petit appartement de 2 pièces, plein de recoins et de secrets et où, elle seule sans doute pouvait retrouver ce dont elle avait besoin. C'est du moins le souvenir que j'en conserve. Mais j'aimais bien cette atmosphère mystérieuse.


                     La Bisage avec son rouet, sur le char "La fileuse" qui clôturait le grand défilé du 12 août 1951.

      (Cliché extrait du livre de François Treuil "La vie d'une commune rurale corrézienne : Saint Jal - 1669-1982)

Avec elle, je me souviens être allé faire les foins, dans le petit pré triangulaire de la propriété de son fils Elie, aux Garennes, alors qu'il était absent. Et nous l'avions rentré au village le lendemain à l'aide d'une remorque à bras. Ma sœur était là aussi. Dures journées !


La propriété d'Elie Dubois, le Ranch des Garennes (Col. JPC)


Anna Feydel, que l'on appelait An-na, était une ancienne couturière et matelassière qui habitait à quelques mètres de la précédente, de part et d'autres du chemin que l'on empruntait alors pour monter à la boulangerie. Il est aujourd'hui fermé au public. Elle aussi habitait dans 2 pièces sans grand confort. Je ne connaissais que la première, avec son cantou à droite, et le sol en terre battue. Elle avait toujours quelques souvenirs des temps anciens à raconter.

Le père Treins, Antoine, et son épouse Marie habitaient dans le bas du village, tout prés de la gare, et ils avaient vu grandir mon père, sa sœur et son frère Marcel. Ils tenaient un café-hôtel-restaurant qui avait connu son heure de gloire, à la grande époque du chemin de fer. Lui, avec son pied-bot, était un grand invalide de la guerre de 14. Toujours en sabots garnis de paille, il se déplaçait difficilement en boitant. C'est en sa compagnie que j'allais pêcher les grenouilles, tout près de là, en dessous du moulin, dans la mare aujourd'hui asséchée, en bordure du ruisseau, à hauteur de la fontaine.

Une branche, un fil, avec au bout un chiffon rouge pour seul appât, et les petits batraciens verts se précipitaient pour mordre, bêtement. Il fallait alors relever la ligne prestement pour amener la proie sur la terre ferme où il était aisé de la capturer. Je n'arrive pas à me souvenir si on les mangeait ou si on les remettait à l'eau. Les écrevisses, sur la route du Plantadis, étaient pêchées à la balance, avec un morceau de viande pour appât. Elles passaient quant à elles sans problème à la casserole d'eau bouillante. Sans remords ! Il faut avouer que tant en ce qui concerne les grenouilles que les écrevisses, personne ne se tracassait de périodes d'ouverture ou de permis de pêche.

Marie Treins, elle, reste dans mes souvenirs à cause de sa gentillesse, et de ses limonades fraiches qu'elle nous offrait régulièrement. Pas de réfrigérateur pourtant chez elle, mais une vraie cave qui conservait la boisson et autres victuailles à une température idéale. Elle m'accueillait toujours avec un sourire éclatant et un puissant « eh, mio ! » - souvenir phonétique approximatif car je n'ai jamais compris le patois -, qui voulait dire sans doute « bonjour, bienvenue, mon petit ». Et les bises claquaient.


Le café-hôtel-restaurant de la famille Treins est au centre de l'image, près de la gare et du moulin
(Col. JPC).


Celle que nous connaissions sous le nom d'Eugénie, tout simplement, s'appelait en fait Eugénie Bossoutrot. C'était chez elle que nous allions chercher le lait. Veuve elle continuait à gérer seule sa ferme à l'écart du village, au milieu des bois, et à élever quelques vaches dans une étable située un peu plus loin.

Lorsqu'elle a cessé son exploitation elle est venue habiter au bourg, et deux logements successifs l'ont accueillie. Elle avait à ce moment là été embauchée comme cantinière à l'école, et préparait chaque jour le repas de midi de plusieurs tablées d'enfants. Elle reviendra ultérieurement habiter sa propriété du Peuch, lorsque des travaux d'amélioration auront été faits dans la maison, rendus possibles par quelques arrangements familiaux.

En ce qui me concerne j'ai surtout appris à l'apprécier plus tard, lorsque ma tante ayant quitté Saint Jal pour la ville afin de se rapprocher de son frère, nous y revenions régulièrement plusieurs fois par an, sur la tombe familiale. Toutes les autres personnes citées plus haut ayant disparu, il n'y avait plus qu'elle pour nous accueillir à bras ouverts. Elle en était heureuse. Elle offrait le café et les gâteaux secs, un verre d'eau avec de la grenadine pour les enfants, et lorsqu'elle savait que nous allions venir, pour la Toussaint, par exemple, elle n'oubliait jamais de préparer un gros gâteau à notre intention. Parfois, selon la saison, nous repartions aussi avec quelques légumes de son jardin, des châtaignes ou des noix : on l'aurait vexée si l'on avait refusé.


D'AUTRES NOMS, DONT JE ME SOUVIENS


Même s'il ne m'était pas familier, je me souviens parfaitement du Maire de la commune de l'époque, Rémy Bourdet, qui a rempli la fonction pendant 36 années.

Le Secrétaire de Mairie, François Treuil, en poste pendant près de 50 ans, était par contre très proche de la famille et je le connaissais bien.

La famille Porte habitait au Chatenet. C'est à pied naturellement, que malgré mes petites jambes, nous leur rendions régulièrement visite. Je me souviens d'avoir joué dans la grange familiale, pleine de foin, avec une « grande », Marie Claire, la nièce de Madame Porte, en vacances elle aussi à Saint-Jal.

Et puis il y avait les commerçants chez qui nous nous approvisionnions. Ils étaient nombreux dans ces années là.

Notre principal fournisseur était l'épicerie que tenait Mme Dubois, dans le haut de la place, à droite, là où elle avait sa maison, celle avec un balcon qui me paraissait immense. Jeanne Dubois disposait d'un pouvoir magique. A l'aide d'un contacteur installé à gauche de l'entrée de sa boutique, elle était chargée chaque soir d'allumer les quelques lampadaires qui éclairaient la place et les rues avoisinantes. Magique, je vous dis !


L'épicerie de Mme Dubois est ici cerclée de rouge. Au premier plan : le bureau de poste.


Dans la route du haut, il y avait aussi l'épicerie Fialeyre, qui faisait aussi fonction de bureau de tabac, mais ce n'était pas souvent que nous y allions. Les deux épiceries étaient concurrentes en ce sens qu'elles étaient toutes deux éditrices de cartes postales : on retrouve encore leur nom sur des vieilles cartes du village. En fait elles se contentaient de vendre les cartes imprimées à leur nom, éditées par une entreprise de la ville.

A côté de la boutique Fialeyre se trouvait le chais du marchand de vin, André Bouchailloux. On le connaissait bien puisqu'il était par ailleurs le voisin de la famille : son épouse, institutrice, disposait elle aussi d'un appartement de fonction dans le bâtiment de la mairie, mais ses fenêtres donnaient du coté de la cour de récréation. Dans le chais, sombre à souhait, point de bouteilles, mais des grands foudres dans le fond, et des tonneaux partout. Il faisait lui même ses mélanges et ses assemblages, qu'il revendait à toute la population.


L'épicerie Fialeyre est la deuxième maison. Suivent le chais de Mr Bouchailloux, la boulangerie Bouysse
et la minoterie (Col. JPC).


Un peu plus loin encore c'était la boulangerie et la minoterie tenues par la famille Bouysse, et puis de l'autre coté de la route la boucherie de Louis Badefort.

La famille Demontjean tenait un café, sur la droite, en montant, peu après avoir quitté la place. C'était là que l'on m'envoyait de temps à autre, seul, acheter une bouteille de limonade. Ma sœur fut aussi chargée plus tard d'accomplir cette mission. Que d'émotions pour nous qui étions timides, pour entrer dans l'établissement et formuler notre demande !

Vers la fin de ces années de vacances à Saint Jal, un autre commerçant avait fait son apparition. C'était un marchand ambulant qui venait proposer aux villageois des légumes et des fruits qui faisaient défaut dans les épiceries et les jardins du village, les melons par exemple. Son camion stationnait sur la place, à hauteur du restaurant Sardin.

Un mot de "la Louise" : c'était la factrice d'alors, qui distribuait le courrier dans le bourg, par tous les temps.

Deux mots aussi de ceux qui me faisaient peur ou tout au moins me mettaient mal à l'aise. Il y avait cette dame âgée dont je n'ai jamais connu le nom (Mme Jarrige, m'a-t-on dit, en février 2017). Elle habitait dans un hameau des alentours et avait la particularité d'avoir un goitre absolument énorme. Et puis je me souviens du "Gimebelé". Là encore c'est un souvenir phonétique, et vraisemblablement ce nom sous lequel on le connaissait n'a jamais été écrit noir sur blanc sur du papier. C'était, un grand handicapé physique qui vaquait comme il le pouvait à ses occupations. Je ne sais rien de plus en ce qui les concerne, sauf que j'évitais de croiser leur chemin.



LE TACOT ET LA GARE

Durant toutes ces années, mes parents n'avaient pas de voiture, et c'est en train que nous faisions le voyage de Brive à Saint Jal. Je ne me souviens pas du temps des locomotives, du vrai tacot d'Uzerche à Saint Jal. Par contre mes souvenirs des autorails qui sentaient mauvais, qui tanguaient dans les courbes et qui rendaient malade, sont encore bien présents. Lorsque j'ai été un peu plus grand, je faisais souvent le voyage debout, avec « les hommes », dans la soute à bagages, malgré la pancarte "interdit aux voyageurs". L'espace qui leur était normalement réservé était en effet régulièrement bondé et il n'y avait pas de place pour tous. André Pénys, un vieil ami de la famille, originaire de La Juque, était alors Chef de train.


Autorail Billard dans une courbe (Col. JPC).


Quand il s'agissait de repartir à Brive, nous quittions l'école au dernier moment et c'est au pas de course que nous descendions vers la gare. On entendait arriver la micheline de loin, avec les coups de sifflet prolongés qu'elle émettait à chaque passage à niveau. Elle avait du mal à monter les cotes et ne roulait pas vite. Nous tournions à droite, sitôt après la dernière maison du bourg, en passant devant la forge du charron dont je ne me souviens pas du nom (un Chastang, peut-être ?), sur un tout petit sentier qui dévalait la pente et raccourcissait quelque peu le trajet. Quand par hasard nous arrivions un peu à l'avance à la gare, il était de tradition pour nos parents de nous peser sur la grosse bascule qui trônait dans un angle de la salle d'attente. Pour nous c'était un jeu comme un autre.

Vous voyez le gros tilleul situé dans le terrain de camping, juste en face du bâtiment de la gare ? Il était à l'époque entre la deuxième voie et l'étang. Et bien il a été planté là par mon grand-père Baptiste (décédé jeune en 1929, alors qu'il était "Chef de Canton" sur la ligne POC Uzerche-Seilhac), avec l'aide de son fils Georges, le petit dernier de la famille, mon père.


Georges Cueille adolescent, devant la gare de Saint Jal, en compagnie de son beau-frère Auguste Comby.
 Ils sont ici à proximité de la source captée qui jaillissait de la colline, et qui fournissait l'eau à la famille,
pour la boisson, la cuisine, la toilette, la lessive,...
(Doc. JPC)

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On pourra trouver quelques autres souvenirs dans les différentes pages du site consacrées à Saint Jal. Mais, pour terminer, en voici un dernier, non pas de moi, mais de ma tante. C'est une anecdote qu'elle racontait volontiers de son vivant.

Alors qu'elle était petite fille et qu'elle habitait à la gare, sa mère l'avait envoyé acheter à l'épicerie la plus proche, un poids déterminé de pruneaux. C'était chez Mialoux, à gauche, juste avant d'arriver sur la place. Mr Mialoux ou son épouse (je ne me souviens pas de ce détail du récit) la sert, en pesant les fruits sur sa balance, une Roberval sans doute. Mais là, problème : un pruneau de plus, le poids était dépassé, un de moins, il n'était pas atteint. Que faire ? La solution fut simple pour le commerçant : il porta un pruneau à sa bouche et le coupa en deux avec ses dents ! La commande exacte fut ainsi honorée.


Jean-Paul Cueille

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