PRÉAMBULE :
La première vraie Foire-exposition de Brive remonte à 1924. Certes, il y avait eu auparavant dans la ville des congrès régionaux de telle ou telle profession. Ils donnaient souvent lieu à des expositions, cependant sans commune mesure avec une Foire-exposition digne de ce nom. Après celle de 1924, nous avons recensé celles de 1927, 1930, 1934 et 1938.
Dans notre article, nous revenons en détail sur les deux premières : 1924 et 1927.
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LA FOIRE-EXPOSITION DE 1924
Elle a eu lieu du 24 au 31 août. Une carte postale, et sa légende involontairement imprécise, ont été à l'origine d'une erreur ultérieure commise par certains, au sujet de sa localisation.
(Doc. delcampe.net)
"Emplacement de la foire-exposition", est-il inscrit. Il était facile de mal interpréter ! Ainsi, Mr Most a été victime de cette imprécision : à la page 193 de son "Brive dans la première moitié du siècle" il a écrit : " La première foire-exposition eut lieu en 1924, devant le nouveau collège". Et non ! Aussi inattendu que cela soit, la foire a eu lieu, pour l'essentiel, à l'intérieur même du collège. Même si les avenues des alentours ont aussi été utilisées, ce sont bien la cour de droite de l'établissement, les préaux et des salles de classe qui ont accueilli stands et animations.
L'hebdomadaire La Croix de la Corrèze est très clair à ce sujet. Dans son numéro 1615 du 24 août, il écrit : "Le collège où est installée cette exposition, occupe une superficie de quatre hectares. Il a coûté fort cher. [...] Le collège reste trop vaste pour son usage habituel, mais comme emplacement de l'Exposition, il est enfin utilisé, et on ne pouvait pas mieux choisir; on y a adjoint l'avenue et le cours qui précèdent, le jardin attenant du faubourg Eyrolles, le tout bien clos et parfaitement aménagé".
Dans le numéro suivant daté du 31 août, le journal publie une photographie en complément :
"Entrée de la Foire-exposition" (Cliché Girardin, Brive) (Doc. AD 19 - cote 68 Pr 21)
Toute la ville était alors pavoisée et illuminée. Les commerçants avaient particulièrement soigné leurs vitrines et leurs étalages, et participaient aux illuminations.
Dans tous les quartiers, ce fut la fête tout au long de la semaine : concours agricole, congrès des pompiers de 5 départements avec exposition de matériel d'incendie place Thiers et défilé en tenue de feu à travers la ville, conférences au théâtre municipal (sur l'aviculture, le Limousin , "Le marché anglais du fruit",...), congrès touristique, assemblée générale de l'Union Nationale des Combattants de l'arrondissement, concerts de musique au kiosque de La Guierle, avec de très nombreux intervenants dont Léon Branchet, les accordéons Dedenis ou encore la Philharmonique sous la direction de Mr Anis, retraite aux flambeaux avec la musique du 126° RI, feu d'artifice, exposition de tableaux, exposition canine avec 150 chiens,...
Le célèbre "chansonnier" occitan, compositeur et joueur de vielle, Léon Branchet (1859-1931). (Extrait de l'ouvrage "L'Athènes du Limousin, ou cinquante ans de vie intellectuelle à Brive-la-Gaillarde", publié en 1926 par Louis de Nussac). (Col. JPC)
Au collège, l'inauguration de la foire-exposition avait eu lieu en présence de Mr Raynaldy, Ministre du Commerce et de Mr Queuille, Ministre de l'Agriculture. Tous deux étaient descendus à l'Hôtel Terminus. De très nombreux commerçants présentaient leurs nouveautés : 210 exposants au total, parmi lesquels l'ébéniste Viry, le fourreur Ducros, Mr Brousse et ses maisons en Éverite, Melle Guesneau et ses cuirs, Messieurs Lafarge et Lachèze avec leurs confections présentées dans de merveilleux salons, avec des stands de vins, de liqueurs et de sucreries. Et encore la présentation par Mr Jacquetty et ses collègues d'installations de TSF permettant d'entendre sur place les nouvelles et les concerts de Paris, sans oublier les cabas de Beynat, les machines agricoles, etc... Une des salles présentait "un des chapeaux légendaires de Napoléon 1° et des souvenirs du Maréchal Brune". "Il faut une journée entière pour visiter avec soin l'exposition" écrira le journaliste de La Croix. Chaque soir, un concert était organisé dans la cour du collège. La musique du 126 s'y produisait, avec la Sainte Cécile, les Touristes, les Enfants de Tulle, la chorale de Limoges, les sociétés musicales de Donzenac, Allassac, Objat, Terrasson, et même Périgueux.
La semaine se terminera bien sûr, le dimanche soir, par un grand banquet de 160 couverts dans une des salles du collège, rassemblant les officiels, les industriels et les commerçants.
Cette première Foire-exposition de Brive aurait accueilli au total plus de 40 000 visiteurs.
Les organisateurs :
A gauche : Joseph Escande, Maire de Brive et Président de la Chambre de Commerce.
A droite : Jacques Goutines, Secrétaire de la Chambre de Commerce.
(La Croix de la Corrèze n° 1615 du 24-8-1924 - Doc. AD 19 - cote 68 Pr 21)
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LA FOIRE-EXPOSITION DE 1927
Elle a eu lieu du 28 août au 4 septembre, et, comme en 1924, en même temps qu'une folle semaine de festivités dans toute la ville. Monsieur Escande qui n'était plus Maire de Brive mais toujours Président de la Chambre de Commerce, et Monsieur Goutines, devenu Secrétaire général de la Chambre, et Commissaire général de la Foire, en furent encore les principaux artisans, alors que Monsieur Chapelle avait été élu Maire de la ville.
C'est encore le Collège de garçons, désormais porteur du nom de Cabanis, qui l'accueillera, en raison de la sous-occupation de ses locaux. La Croix de la Corrèze n° 1772 du 4 septembre s'en réjouit, et écrit, à peu près comme en 24 : "Si les 25 160 mètres carrés qu'occupe le collège de garçons à Brive sont d'ordinaire du terrain gaspillé à cause du petit nombre d'élèves qui y prennent leurs ébats, ils retrouvent toute leur utilité quand ils servent pour une foire-exposition". On remarquera en passant que l'évaluation par le journal de la superficie de l'établissement a notablement été diminuée depuis la précédente édition !
Le journaliste de La Croix est enthousiaste dès l'ouverture de la Foire : "Dès le le matin, les visiteurs affluent. Toute la journée, les quatre guichets distributeurs de billets seront assiégés". Il notera dimanche, plus de 17 000 visiteurs, les jours suivants 3 000, jeudi, plus de 10 000, et il ajoute : "Il faut plusieurs heures pour visiter la foire-exposition. Il faudrait plusieurs jours pour le faire avec fruit. Je ne saurais donner ici une idée détaillée d'une exhibition ou plus de 200 exposants ont installé une usine ou un magasin. Tous disposent d'au moins six mètres de superficie; quelques uns en ont plus de 100. Toutes les branches de l'activité humaine y sont représentées : agriculture et tous les produits mécaniques et autres qui s'y rattachent, alimentation, ameublement, habillement, industrie sous toutes ses formes, électricité, radiophonie, automobile,...". Il n'oublie pas de signaler la présence de "La ferme électrique" : désormais la "fée électricité cuit le rôti sur une table, coupe du bois, hache la paille, traie deux vaches, etc, etc...".
(Col. et cliché du 7-12-2017 : Maryse Chabanier)
A gauche, le stand de La Confiserie Modèle et ses Madeleines Marbot, à la Foire-exposition de 1927 : toute notre équipe a participé aux recherches, autour de cette photographie ni datée avec précision, ni localisée. Nous avons toutes raisons de croire que le deuxième personnage en partant de la droite, le plus jeune, est Paul Camille Quéheillard (dit Paul Quéheillard), né à Brive le 25 janvier 1906. A sa droite posent son père, Nicolas Paul Quéheillard (dit aussi Paul Quéheillard) et sa mère née Marie Mathilde Loisier, alors propriétaires de la Confiserie sise sur la Grand'Place, à Brive. Les personnages des deux extrémités n'ont pas été identifiés. Ce sont soit des personnalités, soit des associés de la famille : peut-être Gabriel Clédat qui, de plus, avait été témoin en mairie lors de la déclaration de naissance du fils, peut-être Mr Delage ? ? Sur la photo de droite, l'emplacement exact du stand de la famille en 1927, photographié en décembre 2017, dans la cour du Lycée d'Arsonval, ex-collège Cabanis : quelques détails caractéristiques des marches et de la ferronnerie ne laissent aucun doute.
Succédant à son père, Paul Quéheillard-fils fut plus tard le renommé propriétaire de la Grande Épicerie Centrale qui jouxtait l'ancien Hôtel de Ville de Brive. Bon nombre de "vieux" brivistes doivent se souvenir de lui. Il est décédé dans notre ville le 1° juillet 2001.
L'enthousiasme du journaliste est cependant contrarié par deux contre-temps. Pour l'inauguration de la manifestation "on avait annoncé la présence des ministres du commerce et de l'agriculture; M. Bokanowski est en Amérique et Mr Queuille soigne ses électeurs à Sornac. Le Chef de cabinet du premier, M. Chapsal, les remplace. Le voici accompagné de MM. Escande, Goutines, de Jouvenel, sénateur, de M. Chapelle, Maire, de M. le Préfet, etc. D'un pas rapide on visite les stands, s'arrêtant un peu devant ceux des œuvres sociales, de l'enseignement technique, des beaux-arts,...". Le Comice agricole cantonal était, lui, "installé sous les grandioses platanes de la Guierle". Il "pourrait être appelé comice à bricoles [raconte-t-il], tant il fut maigre. L'espèce bovine est représentée par de beaux sujets, mais une vingtaine au plus ! La classe des produits culturaux comprend peu d'exposants. Les producteurs se désintéressent de ces concours à cause de l'insuffisance des primes".
Il préfère s'attarder sur les réussites : "Tandis qu'on se presse dans les cours, et devant les stands, les fanfares dont les cuivres étincellent sous le soleil ébranlent les échos de leurs notes stridentes. Aux sociétés locales (Sainte-Cécile, Touristes) se sont adjoints Les Enfants de Tulle, les Avenirs de Donzenac et d'Ayen, l’Étincelle de Branceille, fanfare de village où la qualité compense le nombre. Dés le matin, elles se sont fait applaudir sur les différentes places; l'après-midi, elles se succèdent sur le joli kiosque installé dans une des cours du collège, et que l'horticulteur Brujassou a fort bien fleuri. Le soir, elles se produiront encore sur La Guierle. Je ne parle pas de la musique militaire, parce que celle-là s'est prodiguée presque tous les jours, chaque jour plus aimée et plus applaudie. En plus de la musique, il y a eu toute la semaine diverses attractions qu'il est impossible de détailler ici. Signalons place Thiers la fête foraine, très suivie surtout dimanche".
Un coin de la Foire de 1927.
(La Croix de la Corrèze n° 1772 du 4-9-1927 - Doc. AD 19 - cote 68 Pr 24)
Notons aussi que la carte postale présentée par Lucien Most au bas de sa page 193, avec le château d'eau de La Guierle en arrière-plan, n'est pas de 1927 comme indiqué, mais d'une édition ultérieure.
Laissons maintenant à Louis de Nussac le soin de présenter la place importante qui avait été réservée aux œuvres sociales et aux Arts. Voici quelques extraits de son article publié dans "La Revue Limousine" du premier octobre 1927.
"La Bienfaisance étale les ressources qu'offre la Croix-Rouge, et les galeries de repos imaginées par le Docteur Bosredon à l'hôpital Dubois de Brive. La Protection de l'enfance organisée avec tant d'ingéniosité par Mme Valéry dans son dispensaire de puériculture rivalise avec l'école ménagère si bien tenue par Melles Bahuet et Delsol. Jusqu'au Foyer des Campagnes de Brignac-la-Plaine qui fait connaître quels moyens variés il emploie pour retenir les populations paysannes dans le milieu rural et pour le leur faire apprécier.
La section artistique brilla surtout par son exposition de dentelles et de broderies, lingeries et étoffes peintes, meubles, pyrogravures, cuivres repoussés, ainsi que par ses tableaux de peintures et dessins. Le peintre Raphaël Gaspéri exposait ses paysages et types du pays dans une atmosphère locale très caractéristique. A coté des toiles du maître briviste, on remarqua de véritables révélations en tableautins par Mme Macary, en aquarelles par Melle Guillot, en dessins par Mr Mianne. [...] Les Beaux Arts qui triomphaient dans leur salle particulière sont servis également bien par la série des manifestations esthétiques et surtout musicales que la Foire-exposition provoque dans la ville comme dans l'enceinte du collège Cabanis".
La foule des visiteurs : si nous interprétons bien l'image, c'est au moment où ils quittent la foire. (au centre de l'image, le portail du collège vu de l'intérieur - en arrière-plan, à droite, le clocher de Saint-Martin) (La Croix de la Corrèze n° 1772 du 4-9-1927 - Doc. AD 19 - cote 68 Pr 24)
Louis de Nussac poursuit : "Il y a lieu de mettre hors pair, comme il le mérite, tout d'abord, le grand concert donné au profit d'une œuvre de bienfaisance, avec tant d'éclat, au théâtre municipal, le mardi 30 août, par l'incomparable pianiste originaire de Brive, Blanche Selva, et le violoniste catalan, Jean Massià, avec le concours de quelques professeurs qui suivent les cours d'été de l'école Blanche Selva, en sa villa briviste du Mas-Del-Sol" .
La pianiste de renommée internationale, Blanche Selva (1884-1942). (Extrait de l'ouvrage "L'Athènes du Limousin, ou cinquante ans de vie intellectuelle à Brive-la-Gaillarde", publié en 1926 par le même Louis de Nussac). (Col. JPC)
[...] "Dans la note populaire, mais avec une réelle valeur artistique, est célébré le jeudi premier septembre, le "Centenaire de l'accordéon", aux kiosques de l'Exposition, et de la place de La Guierle. Concours de solistes et de groupes, avec concerts de la Société des Accordéonistes de l'usine François Dedenis, directeur M. Suhit [...]. On "ne saurait passer sous silence un intéressant concours de costumes anciens et régionaux réservé à des enfants de moins de 14 ans, qui s'est tenu en même temps que le concours d'accordéonistes, et qui a été très réussi, tout à l'avantage de ravissants petits limousins si bien habillés et discernés grâce au bon goût de Melle Marguerite Genès et des autres membres du jury". [...]
Ajoutons encore une conférence au théâtre autour du chimiste et homme politique français Marcellin Berthelot, sur le thème "Berthelot et la chimie agricole". Avec même des projections lumineuses ! Et pour la clôture des festivités, au théâtre de verdure de La Guierle, une représentation de l'opéra comique "Mireille" était donnée : le spectacle était gratuit, mais les chaises payantes.
Vignette commémorative éditée à l'occasion de la Foire-exposition de 1927 : "Femme nue, les bras levés, portant un plateau de fruits". (Col. Maryse Chabanier)
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Un jour ou l'autre, peut-être reviendrons-nous sur le sujet, pour
présenter les foires-exposition de 1930 et 1934, désormais organisées
sur la place de La Guierle ? ? Encore nous faudra-t-i trouver les images
indispensables, pour illustrer ce complément !
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