LES PONTS ET PASSERELLES Nous commençons par deux des ouvrages permettant de franchir les voies de chemin de fer qui coupaient en deux l'agglomération naissante de Brive. ► L'élargissement du pont de la Croix Saint-Jacques : il avait été construit au moment de l'arrivée du train à Brive. En 1930, La Croix de la Corrèze nous raconte dans son numéro 1906 du 30 mars, que c'était "un pont étroit, mal éclairé, mal pavé, où l'eau qui suinte a creusé dans la chaussée de profondes ornières" [...]. Il "va être élargi, ainsi en a décidé le conseil municipal, d'accord avec la Compagnie du Chemin de Fer d'Orléans. Pour commencer les travaux, on attend l'approbation du Conseil d’État. La chaussée sera pavée pour éviter la boue, élargie de trois mètres et réservée aux véhicules". [...] Les travaux seront payés au moyen de surtaxes locales sur le prix du transport des marchandises et des voyageurs". Il faudra en fait attendre encore deux ans pour que les travaux débutent. Et c'est dans le numéro 2011 de La Croix en date du 10 avril 1932, que nous pourrons en voir une photographie : ► La construction de la passerelle de Boyer : si le pont de la Croix Saint-Jacques était réservé aux véhicules, il avait fallu créer un passage pour permettre aux piétons de rejoindre la route de Lissac depuis l'avenue de Bordeaux et inversement. Ce fut le passerelle dite de Boyer ou de la Croix Saint-Jacques, dont la construction avait débuté en 1931, selon des techniques très différentes de celles que l'on utilise aujourd'hui. Qu'on en juge ! (La Croix de la Corrèze n° 1984 du 4-10-1931 - Doc. AD 19 cote 68Pr 28) Construite entièrement en béton armé, au-dessus des voies, elle nous est présentée, toute neuve, quelques mois plus tard dans La Croix. De son sommet, on jouit, parait-il, d'un panorama superbe sur Brive. (La Croix de la Corrèze n° 2011 du 10 avril 1932 - Doc. AD 19 - cote 68Pr 29) Le coût des travaux pour les deux ouvrages se montera à quelques 200 000 francs. Nous arrivons aux ponts sur la Corrèze qui, mis à part le pont Cardinal beaucoup plus ancien, datent à peu près de la même époque. Nous ne disposons pas de commentaires, mais uniquement de photographies. Les méthodes de constructions sont celles employées pour la passerelle de Boyer. ► La construction du Pont du Buig : on le connait aujourd'hui sous le nom de Pont du Buy. Il a été construit par l'entreprise S.A.C.I.T.A. Début de construction du Pont du Buig. (La Croix de la Corrèze n° 1984 du 4-10-1931 - Doc. AD19 - cote 68Pr 28) Les travaux sont bien avancés. (La Croix de la Corrèze n° 2021 du 19-6-1932 - Doc. AD19 - cote 68Pr 29) Une polémique avait émaillé en 1932 la construction du pont : lorsqu'ils quittaient le chantier après leur journée de travail, les ouvriers laissaient en place sur les deux rives les échelles que l'on voit sur la photo précédente. Les curieux, ou bien les futurs utilisateurs empruntaient alors les éléments du pont partiellement terminés, pour se rendre d'une rive à l'autre. D’où des risques d'accidents que ne manquera pas de relever le journal. Le pont du Buig est maintenant terminé. (La Croix de la Corrèze n° 2053 du 29-1-1933 - Doc. AD 19 - cote 68Pr 30) ► La construction du Pont de la Bouvie : elle est présentée dans La Croix en même temps que celle du Pont du Buig. Début des travaux du Pont de la Bouvie. (La Croix de la Corrèze n° 1984 du 4-10-1931 - Doc. AD 19 - cote 68Pr 28) Le Pont de la Bouvie est maintenant ouvert au public. (La Croix de la Corrèze n° 2053 du 29-1-1933 - Doc. AD 19 - cote 68Pr 30) LES ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES ► La construction du Collège de garçons : nous sommes en 1938; les travaux de construction du nouveau collège de garçons débutent, sous la direction de l'architecte Macary. L'établissement sera mis en service en 1947 seulement, après la guerre, et récupèrera le nom de Cabanis qu'il avait sur son ancien site. C'est l'aile qui longe le boulevard Henri de Jouvenel qui nous est présentée. Le cliché a été pris depuis la partie haute du boulevard. (La Croix de la Corrèze n° 2355 du 23-10-1938 - Doc. AD 19 - cote 68Pr 35) En arrière-plan on aperçoit les bâtiments de "l'école industrielle", qui n'avaient pas encore l'aspect qu'on leur connaitra plus tard (son aile de gauche n'avait alors qu'un étage, et le bâtiment de tête n'était pas encore construit); son entrée se situait 34 avenue Charles Rivet (actuelle avenue du Président Roosevelt). L'école industrielle était installée là depuis 1932, date de son transfert depuis l'ancien collège de garçons (actuel d'Arsonval) dans de nouveaux immeubles acquis par la ville. ► La construction du Collège Bossuet. Le début des travaux de construction. (La Croix de la Corrèze n° 2021 du 19-6-1932 - Doc. AD19 - cote 68Pr 29) Le journal raconte : " Les terrassements sont activement menés. Vingt ouvriers sont employés; des machines accélèrent leur tâche. A mesure que le chantier s'élargit, on embauche d'autres ouvriers. Ils seront bientôt occupés en nombre important et la construction du nouveau collège contribuera ainsi à diminuer la crise du chômage qui atteint encore trop de travailleurs. A cette heure, des maçons ont déjà commencé les fondations. Dans quelques jours aura lieu la pose solennelle de la première pierre. Les travaux seront achevés au premier avril et dès cette date, l'école pourra fonctionner dans ce nouvel établissement". (La Croix de la Corrèze n° 2025 du 17-7-1932 - Doc. AD 19 - cote 68Pr 29) La Croix de la Corrèze poursuit : [...] "Une cour d'honneur est ménagée face à la
rue Lakanal [actuelle rue Bossuet]. Une galerie courra devant le bâtiment principal. Au
centre, un hall avec à droite le logement du directeur et plus loin la
chapelle. A gauche un parloir, l'amphithéâtre de physique. Au-delà, les
réfectoires, avec, autour d'une cour de service, les logements du
personnel, les cuisines, etc. Au premier étage du bâtiment central les
chambres des professeurs et de l'économe et la bibliothèque. Perpendiculairement
à ce bâtiment, une longue construction abritera les salles de classe où
l'on aura accès par un préau exposé au midi. Des cours très vastes ont
été réservées. Dans tous ces bâtiments, l'air et la lumière pénètreront à
profusion. Bain, douches, etc., tout a été prévu suivant les plus
strictes prescriptions d'une hygiène rationnelle. Et
ce n'est là qu'une première tranche de travaux. D'autres suivront au
fur et à mesure des besoins qui ne tarderont pas à se manifester, tant
est bien établie la réputation du collège Bossuet ".Les travaux exécutés par l'entreprise Brousse, sous la direction de l'architecte Fay, prennent tournure. (La Croix de la Corrèze n° 2055 du 12-3-1933 - Doc. AD 19 - cote 68Pr 30) Vue de l'école coté nord-est, quelques jours avant l'inauguration. (La Croix de la Corrèze n° 2085 du 10-9-1933 - Doc. AD 19 - cote 68Pr 30) L'inauguration officielle de l'école Bossuet aura lieu le 17 septembre 1933. D'AUTRES SERVICES, PUBLICS OU PRIVÉS ► Le nouvel Hôtel des Postes, sur la Place Thiers. Il était auparavant installé rue de l'Hôtel de Ville, mais il était devenu trop petit en raison du développement de la ville. Voici une vue des travaux réalisés par l'entreprise Brousse, sur des plans de l'architecte Geay. Nous sommes sur l'arrière du bâtiment, au tout début de l'année 1930. La technique de construction est voisine de celle utilisée pour les ponts. En arrière-plan, sur la droite un coin de Sainte Ursule avant sa démolition. L'inauguration du nouveau bureau a eu lieu le dimanche 26 avril 1931. (La Croix de la Corrèze n° 1962 du 3-5-1931 - Doc. AD 19 - cote 68Pr 28) Au moment de son
inauguration, le nouvel Hôtel des Postes fut le sujet de plusieurs
polémiques que le journal se fait un plaisir de rapporter. La première concerne son éloignement du centre-ville. On y lit : [...] " Ces louanges officielles enregistrées, faisons nous l'écho des doléances que le public n'a pas ménagées ces jours-ci. D'abord
la distance loin du centre de la ville. Pour tous ceux, et ils sont
nombreux, auxquels ne suffisent pas les boîtes de quartier, aller à la
poste est devenu un voyage. Aussi, on demande que le petit bureau de
l'avenue de Paris soit transformé, dans un local plus grand, en guichet
auxiliaire faisant toutes les opérations. On en désire un autre avenue
Charles Rivet. Nous croyons savoir que des pétitions vont être signées
dans ce sens. Il fut annoncé à l'inauguration que le nouvel Hôtel devrait être agrandi. "Quelle erreur, nous a déclaré un connaisseur des questions postales.
Il faut avoir à l'Hôtel des Postes le central télégraphique et le
central téléphonique, des guichets ordinaires et le logement du
Receveur. Ça y est déjà et suffisant pour toujours " ! ! Après cette dernière affirmation péremptoire, nous pourrions aujourd'hui ajouter : "LOL" (comprenne qui pourra notre excès de jeunisme !). La façade du nouvel Hôtel des Postes. (La Croix de la Corrèze n° 1962 du 3-5-1931 - Doc. AD 19 - cote 68Pr 28) La deuxième polémique concerne la conception même des guichets. " Autre critique formulée celle-là par un employé de banque qui s'y connait. Nous avons loué la riche, claire, spacieuse disposition de la salle du public : guichets sans grilles avec larges tables de marbre. "Soit nous dit le connaisseur. Mais voyez comment la dame employée est en recul devant cette large table. Pour recevoir de l'argent il lui faut, afin de le compter en présence du client, qu'elle se lève chaque fois -quelle gymnastique !- ou que si elle reste assise, elle compte sans être vue. Avec un client de mauvaise foi, ou même s'étant trompé, qui prétendra avoir versé telle somme alors qu'il aura versé moins, comment la dame prouvera-t-elle le contraire ?... Attendez-vous à des conflits...". (La Croix de la Corrèze n° 2072 du 11-6-1933 - Doc. AD 19 - cote 68Pr 30) La même maternité en carte postale (Doc. delcampe.net) ► Un nouveau hall d'abattage aux abattoirs de Brive : C'est en 1900 qu'avait été construit le premier abattoir de Brive. " Samedi, raconte La Croix en janvier 1934, le Conseil municipal a visité les nouveaux bâtiments de l'abattoir de Brive. A cette occasion [...] M. le Maire a rendu hommage à tous ceux qui ont collaboré à cette belle réalisation, depuis Mr Louis Macary, architecte municipal, jusqu'aux ouvriers de Mr Diemer. On voit le hall d'abattage avec ses treuils et ses rails aériens qui permettent la manipulation de la viande et son transport jusqu'au poste de chargement ou au frigorifique. Ce nouveau hall est clair, vaste, pourvu d'eau en abondance, facile à tenir en état de propreté ". (La Croix de la Corrèze n° 2103 du 14-1-1934 - Doc. AD 19 - cote 68Pr 31) Le bulletin municipal de février 1970 (Col. M. V.) consacre un grand dossier à ce même abattoir devenu, 70 ans après sa construction, complètement vétuste. Il évoque à nouveau le hall d'abattage de 1934 : [...] "Ce bâtiment qui est toujours en service comporte six postes d'abattage pour les gros bovins et chevaux et dix-neuf postes d'abattage pour les veaux. Rien n'est prévu pour les ovins qui sont abattus où l'on trouve de la place libre. Le nombre d'abattages est limité pour une période de temps donné. C'est ainsi par exemple qu'il faut cinq treuils pour tuer cinq veaux, alors qu'avec un système plus moderne, deux suffiraient. [...] En 1934, les porcs abattus servaient uniquement à alimenter le marché de Brive. Le local était donc largement suffisant. Mais l'augmentation du nombre des abattages apparut rapidement et révéla l'insuffisance du matériel [...] . Localisation des anciens abattoirs de Brive sur un plan de 1940 appartenant à notre complice M. V. C'était à l'emplacement de l'actuel Centre des Impôts. (cliquez sur l'image pour la rendre lisible) ► La modernisation de l'Usine à Gaz de Brive et l'installation d'un nouveau gazomètre : L'usine à gaz était installée avenue de Bordeaux, juste en face du Lycée Cabanis. Bon nombre de nos lecteurs s'en souviennent certainement. C'est l'historien Henri Delsol qui a été chargé par La Croix de présenter le projet d'aménagement à ses lecteurs et de faire le point sur l'avancement des travaux en 1938. Voici l'essentiel de sa communication. " La nouvelle clientèle que la Société d'éclairage a réussi à se constituer l'a amenée à augmenter la production. Celle-ci a passé rapidement de 4 000 à 6 000 mètres cubes de gaz par jour environ. Les trois fours à cornues en fonctionnement normal, plus un four de réserve pour le cas d'accident, ont suffit à cette production accrue. D'autres installations se sont révélées tout juste suffisantes, en particulier les gazomètres qui arrivent à se vider aux heures de grande consommation. Aussi pour s'assurer une réserve plus grande, et obtenir un gaz parfaitement homogène, la société d'éclairage a-t-elle entrepris la construction d'un vaste gazomètre de 10 000 mètres cubes. On sait qu'un gazomètre est constitué par une cloche en métal renversée sur une cuve remplie d'eau. A mesure que le gaz arrive, la cloche se soulève. Pour augmenter la capacité, on utilise des cloches télescopiques dont les éléments s'emboitent les uns dans les autres, comme ceux d'une longue vue. Le nouveau gazomètre de l'usine comportera trois de ces éléments. Il s'élèvera à une hauteur de 35 mètres, presque égale à celle de la cheminée actuelle de l'usine. Comme il aura plus de 80 mètres de diamètre, on imagine aisément la masse énorme que représente cette construction. La cuve en ciment armé où viendra plonger la cloche télescopique est achevée. Il y a plus d'un an que les premiers terrassements ont été commencés et le chantier a occupé en moyenne une dizaine d'ouvriers. Cette cuve mesure 9 mètres de profondeur et 24 mètres de diamètre. Elle renferme plus de 4 000 mètres cubes d'eau. On est en train de l'emplir pour s'assurer qu'elle est complètement étanche. L'opération demandera bien trois semaines. La cuve constituera alors une magnifique piscine. Il faudra ensuite la vider, ce qui demandera encore plusieurs jours. On installera enfin l'armature métallique et la cloche du gazomètre. Celle-ci sera constituée par des plaques de tôle assemblées à l'aide de rivets placés à chaud et dont il faudra des centaines de mille. L'ensemble de la partie métallique pèsera environ 170 tonnes. Ces quelques chiffres permettent d'apprécier l'ampleur du travail". La construction du nouveau gazomètre. (La Croix de la Corrèze n° 2024 du 3-9-1938 - Doc. AD 19 - cote 68Pr 30) "Ajoutez que la construction de ce nouveau gazomètre entraînera la suppression de deux autres de 600 mètres cubes, d'importantes modifications aux conduites dans l'intérieur de l'usine, la mise en place d'un compteur plus puissant. On prévoit aussi la transformation de certains bâtiments, l'installation d'un nouvel appareil à broyer le coke. Enfin on étudie pour plus tard le remplacement des fours actuels à cornues horizontales par des fours à cornues verticales, se chargeant par le haut, se déchargeant par le bas, plus pratiques et d'un meilleur rendement ". DIVERS AUTRES TRAVAUX ► La construction du Quai Tourny : nous ne disposons d'aucun commentaire au sujet de ces travaux de grande ampleur effectués en 1933 le long du canal Le Clère. Seule la mauvaise photographie qui suit a été publiée dans La Croix, en compagnie de sa légende. ► La construction de la Cité des Roses : encore une polémique lancée par La Croix au moment où les premières familles s'installaient à la Cité des Roses en 1933. Voici l'affaire, où l'on voit le Maire, Henri Chapelle, pris une nouvelle fois à partie par l'hebdomadaire : " Plusieurs journaux publient une note identique annonçant que de nombreux ménages vont habiter à la "Cité des Roses" construite dans des terrains vendus à l'Office des habitations à bon marché par M. Chapelle, maire de Brive. Réjouissons-nous de voir des ménages modestes installés pour un prix modique en des logis confortables, dans cette cité bien exposée qui est comme un prolongement du "Petit Nice". Tout au plus si on peut regretter que ces 80 familles où il y aura beaucoup d'enfants, se trouvent si loin des écoles, des églises, des marchés et autres avantages de la ville. Puis la note complaisante signalée ci-dessus s'achève par cette citation d'un rapport de M. Chapelle : "Offrons aux travailleurs un nid clair, spacieux et sain... Que son regard ne puisse plus accepter la laideur journalière qui jusqu'à présent a été son lot ". Très bien ! Mais observez la photo [ci-dessous]. Certes, les habitants du bâtiment de droite exposé au sud-ouest auront le "nid clair" souhaité par M. le maire. Mais ceux du bâtiment arrière, séparé du premier par une rue sombre étant donné la hauteur des constructions, ces habitants n'auront presque jamais de soleil ! Peut-on dire que leur regard se reposant sur les linges que les ménagères ont coutume d'exposer à leur fenêtre, ne retrouvera pas ainsi la laideur journalière rencontrée jusqu'à présent dans les vieilles rues de Brive". (La Croix de la Corrèze n° 2100 du 24-12-1933 - Doc. AD 19 - cote 68Pr 30) "Pourquoi, au lieu de faire ces bâtiments parallèles, ne les a-t-on pas édifiés dans le prolongement l'un de l'autre, en un site où le terrain ne manque pas, et de manière à donner de l'air et de la lumière à tout le monde ? Ceci n'est pas une critique exagérée : la photo le prouve. Du reste, allez-y voir et vous apprécierez... Et vous songerez aussi aux inconvénients qu'il pourra y avoir à grouper plus de 80 ménages dans ces trois bâtiments. Les casernes ouvrières de M. Chapelle ne feront pas dédaigner les maisonnettes avec jardin de feu Loucheur ". (1° octobre 2017) |